Le 9 février 1450 : mort d'Agnès Sorel

Agnès Sorel est née vers 1420. Son lieu de sa naissance divise encore les historiens : certains pensent qu'elle est née à Fromenteau en Touraine, d'autres situent sa naissance en Picardie, à Coudun, près de Compiègne, d'où étaient originaires son père. C'est en Picardie qu'elle reçut une éducation soignée pour la préparer à occuper la charge enviée de demoiselle de compagnie d'Isabelle de Lorraine, reine de Sicile et femme du roi René. Sa jeunesse et sa beauté la firent très rapidement remarquer par le roi Charles VII. Pierre de Brézé, qui remarqua les regards de son suzerain pour cette nouvelle venue à la cour, la lui présenta. Très rapidement, en 1444, elle passa du rang de demoiselle d'honneur à celui de favorite officielle, ce qui était une nouveauté. Les rois de France avaient jusque-là des maîtresses mais elles devaient rester dans l'ombre. Son art de vivre et ses extravagances rejettèrent la reine dans l'ombre. Elle inventa le décolleté épaules nues qualifié de « ribaudise et dissolution » par les chroniqueurs de l'époque. De vertigineuses pyramides surmontaient sa coiffure. Des traînes allant jusqu'à huit mètres de long allongaient ses robes bordées de fourrures précieuses : martre ou zibeline. Rien qu'en 1444, le roi lui offrit vingt mille six cents écus de bijoux dont le premier diamant taillé connu à ce jour. Pour se procurer ces atours précieux, elle devint la meilleure cliente de Jacques Coeur, marchand international et grand argentier du roi, qui amassait des trésors dans son palais de Bourges. Habile intrigante, elle impose ses amis au roi et s'acquit la faveur des conseillers de la Couronne, qui voyaient en elle le moyen de s'assurer la bienveillance royale. C'est grâce à ces manoeuvres que le roi, en l'espace de quelques mois, lui octroya les fiefs de Beauté-sur-Marne ( d'où son titre de « Dame de Beauté » ), Vernon, Issoudun, Roquesezière et lui offre le domaine de Loches. Le dauphin, futur Louis XI, ne supportait pas sa relation avec son père, estimant sa mère bafouée. Un jour il laissa éclater sa rancoeur et poursuivit, l'épée à la main, l'infortunée Agnès dans les pièces de la maison royale. Pour lui échapper, elle se réfugia dans le lit du roi. Charles VII, courroucé par tant d'impertinence, chassa son fils de la cour et l'envoya gouverner le Dauphiné. Elle donna à son royal amant trois filles, les « bâtardes de France », qu'il légitima : Marie de Valois, Charlotte de Valois et Jeanne de Valois. Ces naissances firent écrire aux moralistes Thomas Basin et Jean Jouvenel des Ursins qu'elle était responsable du réveil sensuel de Charles VII. Jugeant sévèrement sa liberté de moeurs, ils l'accusèrent de faire de ce roi « chaste » un roi débauché. Alors qu'elle allait mettre au monde un quatrième enfant, elle entreprit, en plein hiver, d'aller retrouver le roi à Rouen où il commandait son armée. Nul ne connaît les raisons de ce voyage : se languissait-elle de son royal amant, ou voulait elle le prévenir d'un nouveau complot ourdi par le dauphin ? Installée par Charles au manoir de la Vigne au Mesnil-sous-Jumièges près de Rouen, le 9 février 1450 elle fut soudainement prise d'un « flux de ventre » et mourut en quelques heures, non sans recommander son âme à Dieu et à la Vierge Marie. Son enfant mourut quelques semaines après. Cette mort si rapide fit qu'on cru à un empoisonnement. On accusa même Jacques Coeur, qui fut sans doute plus qu'un ami et qu'elle avait désigné comme exécuteur testamentaire, de l'avoir fait assassiner, mais il fut lavé de ce chef d'inculpation. Les soupçons se portèrent alors sur le dauphin, le futur Louis XI, ennemi du parti qu'elle soutenait. En 2004-2005,une autopsie de son cadavre a révélé que son tube digestif était infesté d'ascaris, et qu'elle avait absorbé du mercure pour s'en débarrasser. C'est l'ingestion de ce métal lourd qui a entraîné sa mort très rapide. Cependant, les doses de mercure observées lors de l'autopsie sont telles ( cent mille fois la dose thérapeutique ! ) qu'il est difficile de croire à une erreur médicale. L'empoisonnement est donc probable et parmi les coupables idéaux, après le dauphin, restent sa cousine germaine, Antoinette de Maignelais, qui trois mois après sa mort prit sa place dans le lit du roi, et son médecin, Robert Poitevin, qui toucha une partie de son héritage ...